La France est riche de 44 540 monuments historiques, ce qui en fait l’un des pays les mieux lotis du monde. A ces monuments classés s’ajoutent « plusieurs centaines de milliers de d’édifices et d’espaces environnants qui sont protégés au titre des abords des monuments historiques ou des sites (domaines nationaux, sites patrimoniaux remarquables, sites classés et inscrits, biens culturels inscrits au patrimoine mondial) ».
Les dépenses publiques en faveur du patrimoine ne cessent d’augmenter, pour atteindre 1,017 milliard d’euros en 2021 auxquels s’ajoutent 60 millions d’euros de la part des autres ministères détenteurs de monuments historiques,
146 millions d’euros issus du plan de relance, et 105 millions d’euros issus des "dépenses fiscales" (défiscalisation des dons, mécénat, Fondation du patrimoine).
A ce montant étatique, il faut encore ajouter les contributions des collectivités territoriales s’élevant à 663 millions d’euros par an. Au total, la dépense publique annuelle en faveur du patrimoine s’élève à 2,018 milliards d’euros.
Quelques millions des fonds européens FEDER (développement régional) et Interreg (coopération territoriale) viennent compléter le pactole.
Et pourtant, la Cour des comptes est formelle : un quart des monuments historiques est dans un état « préoccupant ».
Plusieurs facteurs en sont la cause, notamment l’échec de la réforme de 2009 visant à relever l’Etat de tous les ouvrages classés pour en confier les opérations de conservation aux propriétaires privés (43% des monuments historiques) et aux collectivités territoriales (51%).
Or ces dernières ont insuffisamment organisé l’exercice de leurs maitrises d’ouvrage, ce qui a eu pour conséquence d’empêcher la hausse des opérations de construction initialement prévues.
Et qui dit gestion à la française dit bien sûr asphyxie normative !
Les Sages de la rue Cambon regrettent ainsi pudiquement que « la superposition des statuts [maintienne] une complexité dommageable », conduisant à une protection des sites et des monuments « pointilliste ».
C’est-à-dire qu’avec deux milliards d’euros, nous sommes incapables d’une démarche globale de mise en valeur.
Quant aux tâches des architectes des monuments de France, elles sont plombées par leur « caractère excessivement administratif ».
La dépense globale reste également mal appréhendée : « Le ministère de la Culture ne dispose pas d’une connaissance exhaustive de la dépense consolidée de l’Etat ».
Il en va de même pour les aides déployées par les autres ministères ainsi que des aides de l’Etat dont bénéficient les collectivités territoriales et l’engagement budgétaire de ces dernières.
Cette mauvaise gestion de la protection du patrimoine est corroborée par Stéphane Bern, chargé de la mission patrimoine, qui alerte :
« J’ai l’impression d’être dans un bateau qui prend l’eau et d’écoper avec une cuillère à soupe ».
Sur les 100 000 édifices religieux que compte notre pays, seuls 40 000 sont encore utilisés pour le culte, et 15 000 sont protégés. Résultat : de 2 à 3000 d’entre eux sont abandonnés.
Ce qu’il y a de terrible avec les révélations de Stéphane Bern, c’est qu’il pointe du doigt l’impuissance des pouvoirs publics alors même que nous avons vu que plus de 2 milliards d’argent public étaient injectés chaque année :
« Si toutes les demandes viennent vers moi, c’est qu’il y a une déficience de l’Etat ». Ce n’est donc pas une question d’argent mais une question d’organisation.
Les Français payent des impôts faramineux chaque année pour qu’un pourcentage serve à la sauvegarde des monuments historiques, et mais leur désagrégation se poursuit à cause de la mauvaise gestion étatique.
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