Le gouvernement relance en ce moment l'un des « serpents de mer » de la vie politique française : le prélèvement de l'impôt sur le revenu à la source. De nombreux avantages sont évoqués, comme la simplicité pour le contribuable ou la baisse du coût de la collecte. Mais ces avantages putatifs pèsent peu au regard des inconvénients, chacun rédhibitoire, que cette pratique implique. Le point de vue d'Eudes Baufreton, délégué général de Contribuables Associés.
Sur le site du Parisien, on peut lire « Les patrons collecteront l’impôt sur le revenu », or, c’est la 1ère des 5 raisons pour lesquelles nous sommes contre la retenue de l’impôt à la source : elle transforme les entreprises en percepteurs de l’État, ce qui n’est pas leur rôle ; leur rôle est la création de richesses, pas leur dévolution au fisc.
Cela fait plusieurs décennies que revient, à intervalles réguliers et ce quel que soit le parti au pouvoir, l’idée d’un prélèvement de l’impôt sur le revenu à la source.
Les contribuables sont priés de le voir comme une « bonne » idée, puisqu’il permettrait, selon ses partisans, de simplifier la vie des contribuables, le travail de l’administration fiscale et de diminuer le coût de la collecte de l’impôt.
Le problème, quand l’on présente les choses de cette façon, c’est que l’on essaie de faire croire que la retenue de l’impôt à la source serait novatrice en France, censée être « en retard » sur d’autres pays occidentaux qui la pratiquent depuis longtemps.
En réalité, le prélèvement de l’impôt à la source existe déjà… il s’agit des cotisations sociales, à la fois salariales et patronales, qui réduisent le salaire brut de moitié. Les cotisations sociales sont un « éléphant dans le salon » : elles sont si considérables qu’on finit par oublier leur existence-même. C’est cet oubli qui est à l’origine de l’antienne « La moitié des Français ne paie pas d’impôt », qui est fausse. Les cotisations sociales, mais aussi la TVA, sont des impôts au sens le plus strict du mot : ce sont des paiements auxquels on ne peut se soustraire.
Le plus grand piège des cotisations sociales est qu’elles sont, contrairement à l’impôt sur le revenu, indolores. Depuis sa création en 1990, la Contribution sociale généralisée (CSG) est passée d’1,1% à 7,5% du salaire, une augmentation de 582% ! Et pourtant, cette quasi-multiplication par six de la CSG n’a guère suscité d’émotion dans l’opinion publique.
D’autres motifs justifient l’opposition des contribuables à la retenue de l’impôt à la source :
- Elle transforme les entreprises en percepteurs de l’État, ce qui n’est pas leur rôle ; leur rôle est la création de richesses, pas leur dévolution au fisc ;
- Les contribuables ne seront plus en mesure d’évaluer globalement la charge de l’impôt, et la lisibilité de ce qu’il finance sera encore moindre ;
- Le salarié ne verra plus que son salaire net (encore plus rogné qu’il ne l’est déjà), et l’entreprise devra justifier auprès des salariés les augmentations d’impôt décidées par le législateur ;
- L’État sera certain, sauf travail au noir, de ne plus subir d’impayé, ce qui augmentera mécaniquement la pression fiscale globale ;
- Enfin, le prélèvement de l’impôt à la source va à l’encontre de l’article 14 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, intégrée à la Constitution de la Ve République et prévalant donc sur toute législation : « Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée. »
Pour chacune de ces raisons, Contribuables Associés s’oppose à la retenue de l’impôt sur le revenu à la source.
Eudes Baufreton, délégué général de Contribuables Associés