Chantier de la Maison de la Radio : friture financière sur toute la ligne

Des coûts mal calibrés, des bévues, des caprices et le mauvais choix initial de l’État ont entraîné les contribuables dans un gouffre d’au moins 700 millions d’euros.

Tout a commencé par un temps glacial, le 16 décembre 2009, lorsque Frédéric Mitterrand, alors ministre de la Culture a lancé la rénovation de la Maison de la Radio, à Paris, un chantier programmé sur 6 ans.

Tout s’est terminé il y a quelques jours. Au final, il aura fallu non pas 6, mais 14 ans pour que la commission de sécurité de la Préfecture de police de Paris sonne la fin (provisoire) de cette rénovation. Moyennant une facture trois fois plus élevée que celle annoncée initialement aux contribuables.

La « maison ronde », c’est aujourd’hui 110 000 m², dont un auditorium de 1 400 places (construit sur le modèle de la Philharmonie de Berlin), une rue intérieure, quatre passerelles, une agora centrale et un parking où les bobos viennent parquer leurs voitures électriques.

La maison ronde, c’est aussi le prix d’une remise à neuf d’abord estimée à 262 millions d’euros et qui n’a cessée de s’alourdir au fil des ans.

En 2015, la Cour des comptes dénonçait un budget initial sous-estimé et envisageait un coût final de 575 millions d'euros. Au final, on est plus proche des 700 millions d’euros.

En effet, si Radio France annonce une ardoise de 493 millions d'euros, c’est en oubliant qu’il a fallu reloger les salariés de la Maison de la Radio à mesure que les travaux progressaient.

En 2014, dans un avis consacré en partie à l’audiovisuel public, l’Assemblée nationale estimait ses coûts à 154 millions d’euros sur la base d’un chantier achevé en 2018.

Les travaux ayant duré 5 ans de plus, les coûts dépasseraient finalement 230 millions d’euros. Ce qui porte le total à plus de 700 millions d’euros. Selon une enquête de BFM TV de 2018, il atteindrait même 736 millions d'euros.

Et ce n’est pas fini, puisque la finalisation des « studios de création » de la maison ronde, lancés en 2016 sur la base d’un chèque de 78 millions d'euros n’est pas achevée.

Il faudra attendre 2025 et la pose du dernier micro, pour savoir si de nouveaux dépassements s’ajoutent à cette titanesque facture.

Chantier de la Maison de la Radio : un cafouillage qui coûte très cher

Comme souvent c’est une mauvaise décision de l’État qui est à l’origine de cette saignée financière.

Lors du lancement du chantier, trois options sont étudiées : le maintien de Radio France sur place, le déménagement dans un bâtiment neuf ou le déménagement dans un bâtiment existant.

C’est la réhabilitation « en site occupé » qui sera finalement retenue. D’où une série de complications en cascade dans un univers où pelleteuses et émissions en direct devaient cohabiter.

Sous-estimé, ce problème de bruit a ensuite provoqué de nombreux déménagements vers des sites provisoires, etc.

Au final, on estime que 7 000 déménagements ont été effectués durant les 18 ans du chantier.

La dérive des coûts a aussi été accélérée par des bévues et des caprices directoriaux.

Parmi les caprices des présidents qui se sont succédés à la tête de la maison ronde on peut citer celui de Mathieu Gallet : la rénovation du bureau de l’ancien directeur adjoint de cabinet de Frédéric Mitterrand (moquette + boiseries) a été évaluée à plus de 100 000 euros par Le Canard enchaîné.

Parmi les bévues, on peut citer « l'affaire de l'orgue ». Le ministère de la Culture avait d’abord demandé le démantèlement des orgues des studios 103 et 104, avant de revenir sur sa décision.

Trop tard ! Entre-temps, les orgues avaient été cédés pour 1 euro symbolique et il a fallu racheter des instruments neufs.

Coût total de l’opération (achat + installation + aménagement, etc.), près de 5 millions d'euros !