Dans la rubrique « bien vivre de son travail » (qui rappelle étrangement « travailler plus pour gagner plus…), le candidat Macron promet pêle-mêle une baisse de cotisations sociales pour tous les travailleurs, un 13e mois de salaire pour les smicards, le rétablissement de l’exonération de charges sociales des heures supplémentaires et même le droit à l’assurance-chômage pour les démissionnaires aussi bien que pour les indépendants.
Cette salve de promesses laisse perplexe car, outre un sentiment de « déjà vu », on peut s’interroger sur le financement de toutes ces mesures qui vont du réchauffé au démagogique.
En passant par l’hypocrisie car en précisant que la baisse des cotisations sociales sera financée par une hausse de la CSG (de 1,7 point), Macron finit par avouer qu’il prend dans la poche des travailleurs et des épargnants pour mettre dans la poche des… mêmes travailleurs.
Beaucoup de bruit pour pas grand-chose.
Quant aux entreprises, on leur promet la fin du RSI (remplacé par quoi ?), l’élargissement du régime fiscal de la micro-entreprise, le remplacement du CICE par une baisse de 6 à 10 points des cotisations patronales et la baisse de l’impôt sur les sociétés de 33,33 % à 25 %.
Là encore, c’est de l’ambition au ras des pâquerettes. Remplacer le CICE par une baisse de charges est certes plein de bon sens en termes de simplicité mais c’est tout.
Pour le reste, on rappellera que le recours abusif aux régimes « micro » relève souvent en fait de la « micro-politique ». On fait dans le petit et pendant ce temps on oublie le gros des problèmes. Il faut faire attention à ce qu’aider les petites entreprises au détriment des grandes ne revienne pas à encourager les petites à le rester…
Enfin, en promettant de ramener l’impôt sur les sociétés de 33,33 % à 25 %, Emmanuel Macron ne sait sans doute pas que la dernière loi de finances a déjà commencé à ramener le taux normal à 28 % et élargir le taux réduit à 15 %.
Il est vrai que le bel Emmanuel n’est pas député et avait quitté le gouvernement quand la loi a été votée…
Concernant l’impôt des ménages, il s’agit de faire plaisir à tout le monde, sans froisser Billancourt ni angoisser Passy. On annonce donc que l’on n’augmentera pas la fiscalité actuelle sur l’immobilier et les droits de succession (mais on ne la diminuera pas non plus…), on transformera l’ISF en « impôt sur la fortune immobilière » et on créera un prélèvement unique sur les revenus du capital de l’ordre de 30 %.
A y regarder de plus près, de telles promesses sont pourtant un peu inquiétantes. Faut-il en conclure qu’en échange de la fin de l’ISF sur les actions, nous aurons une super-taxe foncière sur tout l’immobilier, locatif ou non ?
Un prélèvement unique de 30 % sur les revenus du capital est-il vraiment intéressant pour des petits épargnants non imposables qui jusqu’à présent ne payaient « que » 15,5 % de prélèvements sociaux ? Enfin, si ce taux unique s’applique aussi à l’assurance vie, ce sera au détriment de tous les détenteurs d’assurance vie pour qui la taxation est actuellement de 23 % après 8 ans (et abattement de 4 600 ou 9 200 euros…).
Dans tous les cas, on agite les bras, on frais de grands moulinets, on explique aux pauvres qu’on va taxer les riches rentiers de l’immobilier, on caresse les riches en leur expliquant qu’on divise par deux l’imposition de leurs dividendes et en réalité on ne bouge quasiment rien.
J’exagère juste un peu parce que le candidat promet tout de même d’exonérer de taxe d’habitation 80 % des ménages, sans manque à gagner et sans perte d’autonomie fiscale pour les collectivités.
Ce n’est plus Macron le révolté mais Macron le magicien. Car on ne sait pas où l’Etat trouvera l’argent.
Dommage parce que le constat est bon : la taxe d’habitation est effectivement obsolète et doit être balayée. Mais pas d’un simple coup de baguette magique. Rappelons d’ailleurs que celui qui a confondu balai et baguette magique n’était autre que l’apprenti sorcier. Voilà ce qui arrive à vouloir jouer les Mickey.
Mais la morale n’est pas oubliée par Macron qui affirme dans le même temps que les sanctions contre la fraude fiscale seront alourdies. En ont-elles pourtant vraiment besoin, quand on sait qu’après les accès de maccarthysme fiscal des derniers gouvernements, un fraudeur risque déjà 7 ans de prison, des pénalités supérieures aux sommes éludées et des poursuites plus de 10 ans après les frais ?
A part le rétablissement de la guillotine, on ne voit pas bien ce que Macron pourra bien infliger de plus aux candidats à la fraude.
Et pour finir par la retraite, le candidat accomplit le tour de force de promettre un système universel de retraite qui sera le même pour tous… sans toucher à l’âge de départ à la retraite ni au niveau des pensions.
Les promesses, fiscales ou non, d’Emmanuel Macron sont donc à l’image de son programme : plaire à tout le monde à coups de mesures gadget que l’on fait passer pour révolutionnaires.
La lecture du reste du programme est à cet égard assez savoureuse : retour du grec et du latin pour récupérer trois voix d’hellénistes distingués, 200 000 billets d’avion à prix réduit pour les ultra-marins, un pass culture à 500 euros pour tous et même, pour plaire aux écologistes, deux fois moins de jours de pollution atmosphérique ! (sic).
Il n’y a qu’aux disciples de Katmandou à qui Macron n’a pas (pour l’instant) promis un nombre minimum de jours de bonheur par an.
Précisons enfin qu’Emmanuel Macron reste muet sur le prélèvement à la source qu’il n’a donc sans doute pas l’intention de dénoncer. Il faut dire qu’étant ministre de l’Économie lors du lancement du projet par Bercy, il aurait mauvaise grâce à revenir dessus…
Olivier Bertaux, expert fiscaliste de Contribuables Associés
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