Dany, Gérard, Johnny et les autres… Mais que reprochent-ils vraiment à nos impôts ?

Écrit par Contribuables Associés

Quoiqu’en disent les optimistes, l’hémorragie fiscale de nos compatriotes ne fait sans doute que commencer. Car le mal est profond. Bien entendu, le coût prohibitif des impôts français est une des raisons de ces départs.

 

Ainsi, la Belgique ne connaît pas l’ISF, ignore l’impôt sur la plus-value, exonère quasi-totalement les donations et offre aux revenus du patrimoine un prélèvement libératoire de 25 %.

D’autres pays offrent des avantages similaires. Le Luxembourg, par exemple, limite même le prélèvement libératoire à 10 % et ignore totalement les droits de succession en ligne directe. Clairement, un capital familial qui échappe tous les ans à l’ISF, est revendu sans que la plus-value soit imposable puis est transmis hors droits de mutation, cela attire…

Les systèmes fiscaux choisis par nos exilés ne sont pourtant pas toujours aussi paradisiaques qu’ils y paraissent.

Les revenus du travail peuvent en effet y être davantage imposés qu’en France et les droits de succession hors ligne directe y sont parfois redoutables (80 % à Bruxelles !), sans compter l’empilement des impôts propre aux Etats fédéraux comme la Belgique ou la Suisse. Dans ce dernier pays, les cantons connaissent par exemple souvent l’ISF (plus petit, certes…) ou d’autres impôts exotiques comme l’impôt sur les chiens.

Bref, la pression fiscale est un argument pour quitter la France mais est loin d’être le seul.

Une loi de finances anti-optimisation fiscale

Le goût pout l’exil vient aussi du fait que la pression connaissait jusqu’à présent des soupapes que l’on appelait niches ou optimisation. Ces soupapes se raréfient à chaque nouvelle loi de finances. Le plafond est désormais si bas pour les niches qu’on y étouffe.

Quant à la dernière loi de finances, elle a inauguré un nouveau type de mesure : le texte ouvertement anti-optimisation fiscale. Deux articles ont ainsi été écrits spécifiquement contre la donation temporaire d’usufruit et l’apport-cession de titres de société aux seules fins de mettre un terme aux deux méthodes d’optimisation fiscale sous-jacente.

Que reste-t-il donc à un contribuable opprimé à qui est même ôté l’espoir du plan B ? Le plan C du départ…

Le poids des charges sociales 

Une autre incitation connexe à aller voir ailleurs le temps qu’il fait est constituée par ce que l’on pourrait appeler la pression sociale. Par exemple, le Luxembourg pratique un impôt sur les revenus du travail tout à fait normal par rapport à la France mais après des charges sociales beaucoup plus raisonnables : 11,05 % payés par les employeurs et 12,45 % payés par les salariés, le tout sans CSG-CRDS…

En France, en revanche, chaque euro versé en net à un salarié signifie presque un euro versé aux caisses de Sécurité sociale. Autrement dit, tout entrepreneur à la recherche d’employés ira plutôt embaucher à l’étranger et tout salarié sensible à son net sur son bulletin de paie ira chercher un employeur hors des frontières.

L’instabilité fiscale

Cela dit, d’autres raisons de fond mais moins chiffrables sont à l’origine de l’exode fiscal. La première, de plus en plus reconnue, est liée à l’instabilité fiscale dont souffre la France. Toute personne qui investit, prend des risques, travaille ou tout simplement épargne en France ne sait quelle sera la fiscalité appliquée aux fruits de ses efforts.

Elle ignore si, au moment de percevoir la récompense de son action, l’Etat lui laissera 10 %, 25 % ou 50 %… Et si on décide de garder pour transmettre, impossible également de savoir si les règles ayant présidé à la décision seront encore en vigueur au moment de la transmission.

A titre d’exemple, le délai de rappel fiscal a évolué en l’espace de quelques années de 10 ans à 6 ans pour revenir à 10 puis passer aujourd’hui à 15 ans. Certaines donations qui bénéficiaient de l’expiration du délai de rappel ont donc d’un seul coup perdu ce bénéfice et doivent réintégrer une succession qu’elles auraient pu éviter si le donataire était finalement mort avant…

Avec la crise, la durée de vie d’une règle fiscale ne se compte même plus en années mais en mois

De la même manière, les patrimoines français ont assisté en l’espace de 5 ans à l’apparition du bouclier fiscal, sa disparition, l’allègement de l’ISF puis son durcissement, la fin du plafonnement puis son retour sous une nouvelle forme.

Avec la crise, la durée de vie d’une règle fiscale ne se compte même plus en années mais en mois. Dès lors qu’un contribuable ne peut établir en France une stratégie patrimoniale sur le long terme, il ne lui reste que le départ pour pérenniser ses actifs et retrouver un peu de sérénité.

Quant au discours spécieux selon lequel le bouclier fiscal n’a incité aucun Français à revenir dans son pays, c’est au contraire sa suppression rapide qui donne raison à ceux qui n’ont pas voulu rentrer.

La France n’aime pas ses riches

Un autre motif d’exode touche encore plus aux sentiments, celui d’être mal aimé. La France n’aime pas ses riches et fait de la richesse un vice à combattre.

Celui qui est riche ou gagne beaucoup d’argent a forcément quelque chose à se reprocher. Soit il n’a pas mérité son bonheur, soit il a réussi au détriment d’autrui, soit il est égoïste.

Dès lors, mieux vaut partir à la découverte des pays où la réussite n’est pas honteuse et où la générosité relève de la sphère privée et non de la sphère publique. La taxe mort-née de 75 % en est l’exemple flagrant.

Cela revient à dire que plus on est riche et plus on doit se faire pardonner

Le discours officiel du candidat Hollande était que son objet n’était pas d’améliorer les recettes de l’Etat mais seulement d’obliger les plus riches à contribuer à l’effort national, même si cela ne servait à rien. Cela revient à dire que plus on est riche et plus on doit se faire pardonner.

La taxe n’a pas vu le jour mais certains ont senti le vent du boulet et préfèrent prendre les devants. Car l’instabilité ajoutée à la culpabilité crée un cocktail explosif.

L’ancien Président prétendait insupportable que l’on prenne plus de 50 % des revenus d’un citoyen. Le nouveau Président prétend qu’au-delà d’un certain revenu on peut vous en prendre 75 % et qu’au-delà d’un certain patrimoine, on peut même vous prendre 75 % de tous vos revenus.

Car plafonner la somme de l’ISF et de l’impôt sur le revenu à 75 % des revenus revient bien à autoriser l’imposition de 75 % de la totalité des revenus.

L’ exit tax

A ce prix là, autant aller voir ailleurs le taux qu’il fait. Sans compter que seul celui qui a quelque chose à perdre est motivé pour le garder et donc partir. Et cela tombe bien car, seul celui qui a quelque chose à perdre a finalement les moyens de partir.

En somme, Gérard Depardieu est parti parce qu’on l’y a incité mais aussi parce qu’il en avait les moyens. A se demander si le gouvernement lui reproche en définitive d’être parti ou d’en en avoir eu les moyens ?…

C’est d’ailleurs peut-être la raison de l’accélération des départs : demain, il sera peut-être trop tard. La création récente de l’« exit tax » sonne un peu comme un avertissement.

L’Etat français vous laisse aujourd’hui partir mais à condition de lui payer un droit de passage, c’est-à-dire les impôts que vous auriez dû payer si vous étiez resté en France, notamment par la taxation immédiate des plus-values latentes.

Or, le gouvernement aimerait sans doute bien renforcer l’exit tax, en diminuant par exemple les sursis qu’autorise encore la réglementation européenne.

Devant ce risque, certains font leur valise sans attendre, de peur de partir plus tard sans même une valise…

Olivier Bertaux, expert fiscaliste de Contribuables Associés olivier bertaux contribuables associes

Avec Contribuables Associés, luttez pour la réduction des dépenses publiques, car trop de dépenses publiques c'est trop d'impôts, et contre les gaspillages scandaleux d'argent public !

Publié le mardi, 22 janvier 2013

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